À l’éditeur: L’érection pénienne persistante douloureuse (priapisme) est un effet secondaire rare mais très grave qui peut survenir avec les antidépresseurs en général1-4 et avec la trazodone en particulier.5,6 La trazodone est un antidépresseur très couramment prescrit.7,8 Bien que des preuves claires manquent, la trazodone est souvent administrée, en pratique clinique, pour traiter les troubles du sommeil comme dans l’insomnie (par exemple, voir Mendelson8).
Rapport de cas. M. A, un homme blanc de 35 ans, a été admis en 2006 aux urgences avec un priapisme d’une durée d’environ 15 heures. L’entrevue clinique n’a pas révélé d’événements antérieurs de priapisme, de toxicomanie ou de traumatisme génital.
Ses antécédents cliniques contenaient un épisode de thrombose veineuse profonde, suivi d’une embolie pulmonaire, à l’âge de 21 ans. Il a été traité depuis lors avec un anticoagulant à l’antivitamine K (acénocoumarol). L’étiologie sous-jacente de cet événement thrombotique n’avait jamais été déterminée. Outre le priapisme, les résultats de l’examen physique, de l’échantillon de sang et des analyses toxicologiques étaient dans les limites normales. La thérapie anticoagulante a abouti à un rapport normalisé international (INR) de 3,8, supérieur à la plage de référence (0,8–1,2). Le dépistage des drogues psychoactives et de la toxicologie urinaire était négatif. Les antidépresseurs n’avaient pas été dépistés. Le sang aspiré du corps caverneux a été soumis à des analyses de gaz sanguins et était compatible avec un priapisme ischémique.
Après un shunt hivernal réussi, une rémission complète du priapisme a été obtenue et le patient a été libéré dans les 3 jours. Malheureusement, le patient n’a pas mentionné, dans un premier temps anamnèse, une introduction récente de trazodone dans son traitement médical pour une plainte de trouble du sommeil par un psychiatre. Le patient ne s’est pas présenté à une visite de suivi, mais il a été réadmis 10 jours plus tard pour un priapisme récurrent d’une durée de 4 heures.
Cette fois, un entretien clinique a révélé l’introduction de trazodone 150 mg/j (au coucher) par un psychiatre il y a 3 semaines pour une plainte pour trouble du sommeil. Le patient a également admis qu’il avait pris 300 mg au lieu de 150 mg plusieurs fois au cours de cette période. Le diagnostic psychiatrique posé par le médecin traitant était (1) une dyssomnie non spécifiée par ailleurs sur l’axe 1 et (2) un trouble de la personnalité non spécifié par ailleurs sur l’axe 2, selon les critères du DSM-IV.
Les tests sanguins n’ont révélé aucune anomalie à l’exception d’un INR à 12 (vérifié sur 2 échantillons de sang différents). Malgré un nouveau shunt, une incision du corps caverneux et spongieux et un traitement anticoagulant avec un INR à 12 ans, le patient a eu un résultat défavorable avec une thrombose persistante. Quarante-huit heures plus tard, une nécrose sèche du gland est apparue. Après 3 semaines de traitement conservateur, l’amputation du pénis avec périnéostomie a dû être réalisée (figure 1).
( À gauche) Nécrose sèche du Pénis et du Scrotum, (au milieu) Intervention chirurgicale et (à droite) Périnéostomie finale (images de l’épisode récurrent uniquement)
Bien que le cas présent ait combiné plusieurs facteurs de risque avec des antécédents de thrombose veineuse profonde et une étude du génotype qui a montré une mutation hétérozygote R506Q pour le facteur Leiden V, nous ne pouvons pas expliquer une thrombose avec un INR à 12 et des taux normaux d’antithrombine III et de protéines C et S. De plus, aucun épisode de priapisme n’est survenu avant l’introduction de la trazodone chez ce patient. La prescription d’antidépresseurs et probablement de trazodone en particulier doit être soigneusement administrée et étroitement surveillée chez les patients ayant des antécédents de coagulopathie ou de troubles de la coagulation.