Un nouveau rapport concluant que le racisme au Musée canadien des droits de la personne était choquant – mais prévisible

Le Musée canadien des droits de la personne a fait les manchettes pour toutes les mauvaises raisons. Elle a rejoint les rangs de plusieurs institutions de premier plan, de Rideau Hall au Musée des beaux-arts de Montréal, qui ont été secouées par des allégations de discrimination et de harcèlement.

Le musée des droits de l’homme n’est pas étranger à la controverse. De nombreuses questions de ses premières années font maintenant partie du dossier public. En 2012, l’éminente avocate et spécialiste des droits de l’homme Mary Eberts a dénoncé l’ingérence du gouvernement dans le musée et son incapacité à intégrer adéquatement les perspectives et les organismes autochtones dans le développement des galeries.

Jusqu’en 2015, le gouvernement conservateur fédéral a tenté d’interférer avec le contenu, poussant plutôt à des « histoires plus positives », comme l’a écrit le professeur de droit Ken Norman dans l’anthologie de 2015, L’idée d’un musée des droits de la personne.

J’ai été conseiller externe et examinateur par les pairs pour le musée pendant plusieurs années. La crise actuelle peut être choquante, mais c’est une conséquence prévisible de l’histoire du musée qui sépare les pratiques de gestion stratégique des principes des droits de l’homme.

Les allégations ont circulé sur les médias sociaux sous le hashtag #Cmhrstopling. Ils incluent également des incidents survenus de janvier 2015 à la mi-2017, lorsque le personnel du musée a accepté de censurer le contenu LGBTQ2 + à la demande de groupes religieux. Le tollé qui a suivi a incité le PDG du musée, John Young, à démissionner. Le conseil d’administration a lancé un examen indépendant par une tierce partie.

Le racisme est  » omniprésent et systémique  »

Le 31 juillet 2020, la commission a reçu un rapport intérimaire de cet examen qu’elle a rendu public le août 2020. 5. Le rapport s’appuie sur des entretiens avec le personnel et contient 44 recommandations. Il dit que le racisme est « omniprésent et systémique. » Il confirme que les personnes noires et autochtones et les personnes de couleur ont subi des impacts négatifs et signale des incidents d’hétérosexisme, d’homophobie et de sexisme. (Le conseil d’administration fera l’objet d’un deuxième rapport.)

Le rapport a été accepté par le conseil d’administration.

Il contient de nombreuses recommandations pour une représentation diversifiée à tous les niveaux du musée, y compris le PDG. Il souligne l’importance de la réconciliation avec les peuples autochtones et met fortement l’accent sur l’inclusivité et l’engagement communautaire dans l’élaboration de contenus et de politiques. Le rapport note également que le personnel  » à l’avant-garde  » qui interagit avec le public et élabore des programmes a généralement un fort intérêt ou des antécédents en matière de droits de la personne. La direction, en revanche, ne le fait généralement pas, et considère le musée comme axé sur « la génération de revenus. »

La déconnexion entre le personnel et la haute direction soulignée dans le rapport résonne. Il en va de même pour les préoccupations liées au succès commercial et à l’engagement des entreprises au détriment des programmes substantiels en matière de droits de la personne.

Le fait que des années d’incidents relatés dans le rapport auraient dû échapper à l’avis du conseil d’administration témoigne à tout le moins d’une relation dysfonctionnelle entre la haute direction et le conseil. C’est quelque chose dont le conseil est responsable en fin de compte.

Le rapport n’est pas sans défauts. Il fait référence à l’égalité en termes d ‘ »égalité formelle » au lieu d' »égalité réelle ». » L’égalité formelle n’a pas été la norme juridique au Canada depuis de nombreuses années, tandis que l’égalité réelle a été établie comme la bonne approche par la Cour suprême du Canada.

La distinction est importante car l’égalité ne doit pas simplement signifier que tout le monde est traité de la même manière en tout temps. Au contraire, une approche de fond reconnaît les différences entre les personnes et le fait que des approches différentes peuvent être nécessaires pour parvenir à l’égalité.

 Une femme se tient devant l'exposition de couverture de témoin au Musée canadien pour les droits de la personne. L'exposition présente des objets de l'époque des pensionnats indiens, notamment des insignes et des trophées, des chaussures et une porte de l'une des écoles.
L’exposition de couverture des témoins au Musée canadien des droits de la personne. LA PRESSE CANADIENNE / John Woods

Ces questions n’enlèvent rien aux problèmes écrasants et graves au sein du musée que le rapport met en évidence. Cependant, d’autres questions clés découlent du statut du musée en tant qu’institution nationale et de son histoire de gouvernance. Les prochaines étapes doivent s’attaquer activement à sa vulnérabilité aux pressions extérieures et à l’autocensure.

Ma propre expérience souligne l’importance de renforcer les relations avec les ONG canadiennes de défense des droits de la personne. Au fil des ans, des dirigeants éminents de la communauté canadienne des droits de la personne m’ont exprimé leur frustration devant le manque d’ouverture du musée pour dialoguer avec les défenseurs des droits de la personne d’aujourd’hui, ou pour aborder les questions et stratégies actuelles afin de mobiliser l’action communautaire.

Le musée doit regagner non seulement la confiance du public, mais aussi celle de son personnel, qui travaille depuis des années à nouer des relations avec les parties prenantes. Leurs efforts ont été réduits en cendres.

Renouer avec les droits de la personne

Ce moment dans le temps offre l’occasion de se réapproprier et de rétablir le musée en tant que médiateur respecté des conversations difficiles et des « histoires difficiles », comme le dit la chercheuse Ruth B. Phillips dans ses recherches sur la représentation et l’engagement des peuples autochtones dans les musées canadiens.

En effet, la place du musée au carrefour même de la mémoire, du discours et de la dissidence aiguise plutôt que de résoudre des questions épineuses sur ce que « comptent » les droits de l’homme, dont les histoires sont mises en avant et pourquoi.

Les approches fondées sur les droits de l’homme devraient être intégrées dans la réflexion de la direction. La connexion forte et authentique avec la société civile fait partie d’une approche participative. Cela signifie un engagement accru avec la société civile et les communautés racialisées. Sinon, le musée risque de devenir timide, ne faisant que perpétuer des illusions de compréhension et de progrès.

Le spécialiste des droits de la personne David Petrasek avait longuement réfléchi au rôle du musée au Canada. Comme il nous l’a rappelé un jour, il y a quelque chose de  » dangereux et d’éclairant  » dans les droits de l’homme. L’engagement de Pauline Rafferty, présidente du conseil d’administration et chef de la direction par intérim du musée, à se réapproprier les principes de dignité humaine et de respect sont des signes d’espoir qu’un exploit plus audacieux est possible.

Le rendez-vous du mois d’août. 10 du nouveau président et chef de la direction, Isha Khan, un avocat spécialisé dans les droits de l’homme, est un autre signal prometteur.

Le Musée canadien des droits de la personne devrait rejeter la prudence et l’orthodoxie inhérentes à la gouvernance institutionnelle qui sont typiques des institutions fédérales et la remplacer par le type de démocratie radicale et de transparence que les principes des droits de la personne exigent. Ce serait une expérience. Mais c’est celui qui reconnecterait la gouvernance stratégique aux principes des droits de l’homme.

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